A mort le travail ! le nouveau doc de Pierre Carles...

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A mort le travail ! le nouveau doc de Pierre Carles...

Post by pec » Tue Nov 04, 2003 3:33 pm

Voici un article du Courrier du 31.10.03 sur le film de Pierre Carles,
l'avant-première c'était hier à l'Usine... (je l'ai loupé)


DOCUMENTAIRE - «Attention danger travail» des documentaristes Pierre Carles,
Christophe Coello et Stéphane Goxe est diffusé en Suisse romande dès lundi.
Le film, partisan et convaincant, collecte les témoignages de «chômeurs
heureux» qui après un licenciement ou un arrêt de travail ont pris la
décision de sortir du marché de l'activité salariée. L'occasion également de
faire le point sur l'Allocation universelle en Suisse.

«Travail: du latin tripalium, instrument de torture à trois piques utilisé
contre les esclaves.» Pierre Carles (Pas vu, pas pris, La Sociologie est un
sport de combat, Enfin pris?), Christophe Coello et Stéphane Goxe donnent
très vite le ton de leur dernier film Attention danger travail. Mais les
mots qui s'impriment en blanc sur fond noir, s'ils prêtent au sourire
complice, évoquent la triste réalité du travail dans la société
contemporaine. Dans son édition de juin dernier, Le Monde diplomatique
rappelait, sous la plume d'Ignacio Ramonet, à quel point le travail tue,
blesse, abîme les travailleurs: chaque jour dans le monde plus de 5000
personnes ont perdu la vie lors d'un accident du travail. En France, ils
sont plus de deux morts et 3700 blessés par jour. Et Ramonet de conclure:
«Comment ne pas comprendre la colère des citoyens?» Les auteurs d'Attention
danger travail, quant à eux, ont décidé d'interroger ceux qui «s'en sont
sortis», que l'on appelle aujourd'hui les «chômeurs heureux» et qui
cherchent à s'épanouir avec peu de ressources, mais avec du temps à
profusion. Bien décidés à ne plus faire les frais de la guerre économique.

CHAMP, CONTRE-CHAMP
Cette guerre économique, Carles, Coello et Goxe la montrent. Publicités
d'entreprises intérimaires, congrès du Mouvement des entreprises de France,
discours des patrons, scènes d'endoctrinement des employés alternent avec la
parole humaine des «déserteurs du travail» qui reçoivent les intervieweurs
chez eux. D'autres extraits - bizarres intermèdes - viennent enrichir le
documentaire.
Et ceux-là sont volontairement saisissants. On pense notamment à «Feniant»
de Dupain, morceau de rock chanté en occitan et qui raconte à la première
personne le licenciement d'un vieil ouvrier, moins rentable, donc «feniant».
On est proprement bouleversé par le plaidoyer contre la chaîne de Bruno
Muel, Avec le sang des autres, où, toujours à la première personne, un
ouvrier de Peugeot parle de ses mains qu'il ne peut plus plier, avec
lesquelles il ne peut plus changer sa fille et toucher sa femme. Des mots
qui restent agglutinés dans la gorge et qui lorsqu'ils sortent, sortent
«n'importe comment, tout d'un coup». Mais toujours la présence des chômeurs
et RMistes interrogés revient à l'écran et apaise.
Oui, un autre monde est possible, affirment-ils. Pas les mois suivant leur
licenciement, mais plus tard, lorsque, résignés à ne plus trouver d'emploi
stable, ils se débarrassent des derniers jugements moraux qu'ils portent sur
eux-mêmes. Car, dans le regard de la société du travail, le chômeur est
forcément coupable. De manière frappante, tous les interviewés parlent de
leur retour ou découverte de la lecture, du musée, du théâtre, du cinéma.
Tous glorifient ce fameux «temps libre» qui leur est devenu indispensable.
Un temps pour ne rien faire, s'ils le désirent, mais surtout pour s'investir
dans d'autres formes d'activités.

QUELLES RESSOURCES?
Mais Carles, Coello et Goxe n'en évitent pas pour autant la question que
tous se posent. Comment vivent-ils sans salaire? «Les Français doivent
comprendre que pour travailler moins, il faut arrêter de consommer», répond
un entrepreneur «repenti». L'équation paraît simple: plus de voiture et des
vacances pas très loin. Pour le reste: le chômage et le RMI, même si ces
sommes restent dérisoires. Pour vivre dans cet autre monde, tous déclarent
avoir un «système D». Cette forme de «débrouille» était déjà revendiquée
sous le nom de «ressources obscures» il y a près d'une dizaine d'années par
les Glückliche Arbeitslosen, les Chômeurs heureux allemands, qui se
fondaient sur une étude sociologique. Des sociologues avaient établi que les
revenus d'une famille moyenne de douze personnes du Grand Yoff, une des
banlieues les plus déshéritées de Dakar, étaient sept fois supérieurs à
leurs ressources officielles: «Non que ces gens aient trouvé la formule
miracle pour multiplier les billets de banques, mais ils savent augmenter
l'effectivité des finances précaires, en en organisant la circulation
intensive.»[1]

UN FILM PARTISAN
Attention danger travail n'est pas une enquête exhaustive sur la question du
chômage, c'est un film partisan. Rendant subversive la parole, non plus
colérique mais tranquillisée, des chômeurs, il la rend parfaitement claire
et audible pour ceux qui ne l'entendent généralement pas. Repoussant tous
les stéréotypes dominants sur le chômage, le film de Carles, Coello et Goxe
montre également ses limites qui sont celles d'une société qui se ment:
personne ne sait aujourd'hui ce que signifie être chômeur, personne ne sait
exactement combien de chômeurs désertent définitivement le marché de
l'emploi. Mais Attention danger travail affirme sans conteste que les
chômeurs s'apprêtent à rompre avec le malheur obligé du chômage. Et que la
société pourrait très bien s'accommoder de l'accroissement du temps libre et
de la diminution des activités salariées.


[1] http://www.diegluecklichenarbeitslosen. ... ancais.htm



:wink:
La liberté des uns s'arrête là où elle nuit à la santé des autres...

pec
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Post by pec » Tue Nov 04, 2003 3:34 pm

en faite le titre est «Attention danger travail» et pas A mort le travail !

:oops:
La liberté des uns s'arrête là où elle nuit à la santé des autres...

Jack Bauer
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Re: A mort le travail ! le nouveau doc de Pierre Carles...

Post by Jack Bauer » Tue Nov 04, 2003 3:59 pm

pec wrote:l'avant-première c'était hier à l'Usine... (je l'ai loupé):
Damned ! Et personne ne me l'avait dit ! J'espère qu'ils parviendront à l'éditer en VHS ou DVD comme Pas vu pas pris, parce qu'il ne faut pas trop comptrer sur les télés pour diffuser du Pierre Carles...

pec
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Post by pec » Tue Nov 04, 2003 4:22 pm

«Attention danger travail» des documentaristes Pierre Carles,
Christophe Coello et Stéphane Goxe est diffusé en Suisse romande dès lundi.

:wink:
La liberté des uns s'arrête là où elle nuit à la santé des autres...

pec
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Post by pec » Tue Nov 04, 2003 4:27 pm

la bande d'annonce !

[url]javascript:popupWindow('cinetv/cinetv3.php?IDfilm=2521&IDBA=2746&typba=real&run=moyenne[/url]


je ne l'ai pas vu et je ne sais pas si le lien fonctionne...
La liberté des uns s'arrête là où elle nuit à la santé des autres...

pec
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Post by pec » Tue Nov 04, 2003 4:30 pm

PROGRAMME DE PIERRE CARLES EN SUISSE ROMANDE

PROJECTIONS DES FILMS, SUIVIES DE DÉBATS EN SA PRÉSENCE
mercredi 1er octobre 2003


(Lundi 3 novembre 2003 à 20h00 / GENEVE (GE)
Attention danger travail (109’)
Cinéma Spoutnki,11, rue de la Coulouvrenière
Avec Les Désaxés, UniGE http://www.desaxes.org/)

Mardi 4 novembre 2003 de 16h00 à 19h30 / NEUCHATEL(NE)
Pas vu pas pris (85’)
Enfin pris ?(93’)
Aula Faculté des Lettres, Université de Neuchâtel, Jeunes-Rives 1.Avec Halluciné, UniNE http://www.unine.ch/

Mardi 4 novembre 2003 à 20h30 / NEUCHATEL(NE)
Attention danger travail (109’)
Cinéma Bio, 27, fg du Lac. Avec Halluciné, UniNE http://www.unine.ch/

Mercredi 5 novembre 2003 à 20h00 / ECHALLENS(VD)
Attention danger travail (109’)
Cinéma de la ville
Avec Acrimed http://acrimed.samizdat.net/

+ passage 12h30 RSR (Radio Suisse Romande)

Jeudi 6 novembre 2003 à 20h00 / LAUSANNE(VD)
Attention danger travail (109’)
Cinéma Zinema, 4, rue du Maupas
Avec Acrimed http://acrimed.samizdat.net/


Puis jusqu’à fin novembre voir : http://www.zinema.ch/
La liberté des uns s'arrête là où elle nuit à la santé des autres...

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Post by pec » Tue Nov 04, 2003 4:36 pm

très bien en fond d'écrans au bouleau !!!


Image
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Post by pec » Tue Nov 04, 2003 7:40 pm

lien sur la bande annonce 2 ème essai !!!

http://fr.mediaframe.yahoo.com/launch?l ... 371&a=0,30
La liberté des uns s'arrête là où elle nuit à la santé des autres...

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Post by pec » Mon Feb 23, 2004 1:35 am

Je suis aller le voir samedi soir, il est vraiment très bien !!!


Tous les jours à 18:00 au Scala 1




Pour commander une k7 d'un des filmes de Pierre Carles !!!

cassette(s) de ENFIN PRIS ? X 20 euros

cassette(s) de JUPPÉ, FORCÉMENT... X 15 euros

cassette(s) de PAS VU PAS PRIS : X 20 euros

cassette(s) de LA SOCIOLOGIE … X 20 euros (1)

http://www.homme-moderne.org/images/fil ... mande.html





http://www.rienfoutre.org/


CITATIONS AU TRAVAIL



« Il n'est pas d'individu plus fatalement malavisé que celui qui consume la plus grande partie de sa vie à la gagner. »
Henry D. THOREAU : La vie sans principes.

« Le propre du travail, c’est d’être forcé »
ALAIN

« Rien ne sert d’être vivant, s’il faut que l’on travaille. »
André BRETON

« L’esclavage humain a atteint son point culminant à notre époque sous forme de travail librement salarié. »
George BERNARD SHAW

« La vie n’est pas le travail : travailler sans cesse rend fou. »
Charles DE GAULLE

« L'Homme est un être de désir. Le travail ne peut qu'assouvir des besoins. Rares sont les privilégiés qui réussissent à satisfaire les seconds en répondant au premier. Ceux-là ne travaillent jamais. »
Henri LABORIT : Éloge de la fuite.

« Que reste-t-il d’étincelle humaine, c’est-à-dire de créativité possible, chez un être tiré du sommeil à six heures chaque matin, cahoté dans les trains de banlieue, assourdi par les fracas des machines, lessivé, bué par les cadences, les gestes privés de sens, le contrôle statique, et rejeté vers la fin du jour dans les halls de gare, cathédrales de départ pour l’enfer des semaines et l’infime paradis des week-ends, où la foule communie dans la fatigue et l’abrutissement ? (…) De la force vive déchiquetée brutalement à la déchirure béante de la vieillesse, la vie craque de partout sous les coups du travail forcé. »
Raul VANEIGEM : Traité du savoir-vivre à l’usage des jeunes générations.

« L’amour du travail bien fait et le goût de la promotion dans le travail sont aujourd’hui la marque indélébile de la veulerie et de la soumission la plus stupide. »
Raul VANEIGEM : Ibid.

« L’organisation du travail et l’organisation des loisirs referment les ciseaux castrateurs chargés d’améliorer la race des chiens soumis. »
Raul VANEIGEM : Ibid.

« Se rendre à un travail, c’est se constituer prisonnier. »
Anonyme

« Si tu as envie de travailler, assieds-toi et attends que ça passe. »
Proverbe corse

« Le travail est l’opium du peuple… Je ne veux pas mourir drogué. »
Boris VIAN

« On dit qu’il y a trois millions de personnes qui veulent du travail. C’est pas vrai, de l’argent leur suffirait. »
COLUCHE

« En napolitain, le mot travailler n’existe pas. On dit fatigare. »
Roberto ROSSELLINI

« L’homme est né pour le travail comme l’oiseau pour voler. »
La bible (Le livre de Job)

«Arbeit macht frei » (Le travail rend libre)
Inscription à l’entrée des camps nazis

« Travail, famille, patrie »
Devise du régime de Vichy

« Le travail est, dans notre société, pour nous, au cœur du lien social. Nous ne voulons pas une société d'assistance, mais une société fondée sur le travail et l'activité productrice. »
Lionel JOSPIN

« La "société du travail" de Jospin a deux slogans ; travailleurs, craignez le chômage et fermez vos gueules ! Chômeurs, humiliez-vous pour mendier un emploi que vous n'aurez pas.
Pas de "plein emploi", une vie bien remplie ! »
Des chômeurs/meuses actifs/ves de l'Assemblée de Jussieu.

« J'avais pris l'habitude de regarder autour de moi, d'observer ceux que je côtoyais dans la rue, dans le métro, au petit restaurant où je prenais mes repas de midi. Qu'avais-je vu ? des gueules tristes, des regards fatigués, des individus usés par un travail mal payé, mais bien obligés de le faire pour survivre, ne pouvant s'offrir que le strict minimum. (…) Des êtres connaissant leur avenir puisque n'en ayant pas. Des robots exploités et fichés, respectueux des lois plus par peur que par honnêteté morale. Des soumis, des vaincus, des esclaves du réveille-matin. J'en faisais partie par obligation, mais je me sentais étranger à ces gens-là. Je n'acceptais pas que ma vie soit réglée d'avance ou décidée par d'autres. »
Jacques MESRINE

« Nous n'avons plus de travail à perdre.
Qu'attendons-nous ? »
Un chômeur (Bourg-en-Bresse, le 18/01/98)

« Quand le travailleur s'endort il est bercé
par l'insomnie
et quand son réveil le réveille
il trouve chaque jour devant son lit
la sale gueule du travail
qui ricane qui se fout de lui »
Jacques PREVERT : « Le paysage changeur », Paroles.

« Le travail est probablement ce qu'il y a sur cette terre de plus bas et de plus ignoble. Il n'est pas possible de regarder un travailleur sans maudire ce qui a fait que cet homme travaille, alors qu'il pourrait nager, dormir dans l'herbe ou simplement lire ou faire l'amour avec sa femme. »
Boris VIAN

« Chômeurs, salariés, feignants, chenapans
même combat »
Slogan de la manifestation du 27 janvier 1998 à Paris.

« "Le travail rend libre" disait-on. Eh bien non !
On reconnaît le niveau de liberté d'un individu non à sa capacité à travailler servilement, afin de consommer servilement, mais à son degré d'épanouissement dans les activités et les loisirs qu'il aura définis librement et en toute conscience.
Laissons tomber le partage du travail,
et vive le partage des bons moments !
Pour une révolution ludique et choisie ! »
GIGN (Groupe d'Intervention Gaillardement Nuisible), Bordeaux, février 1998

« Si le chômeur est malheureux, ce n'est pas parce qu'il n'a pas de travail, mais parce qu'il n'a pas d'argent. Ne disons donc plus demandeur d'emploi mais "demandeur d'argent" ; plus "recherche active d'emploi", mais : "recherche active d'argent". »
Chômeurs heureux de Berlin : Rapport d'inactivité n°1, 1996.

« Le travail est un meurtre en série, un génocide. Le travail tuera, directement ou directement, tous ceux qui lisent ces lignes. Dans ce pays, le travail fait chaque année entre 14 000 et 25 000 morts, plus de deux millions d'handicapés, 20 à 25 millions de blessés. C'est bien ce qui s'appelle un meurtre ! »
Bob BLACK : Travailler, moi ? Jamais !

« Les économistes s'en vont répéter aux ouvriers : travaillez pour augmenter la richesse nationale ! Et cependant un économiste, Destutt de Tracy, répond : les nations pauvres, c'est là où le peuple est à son aise ; les nations riches, c'est là où il est ordinairement pauvre. Mais assourdis et idiotisés par leur propres hurlements, les économistes de répondre : travaillez, travaillez toujours pour créer votre bien-être ! Travaillez pour que, devenant plus pauvres, vous ayez plus de raisons de travailler et d'être misérables. »
Paul LAFARGUE : Le Droit à la paresse

« Jamais nous ne travaillerons. »
Arthur RIMBAUD

« Abolition du travail aliéné. »
Guy DEBORD

« Dès qu'il n'existe pas de contrainte physique ou autre, le travail est fui comme la peste. »
Karl MARX : Manuscrit de 1844

« Dans la glorification du "travail", dans les infatigables discours sur la "bénédiction du travail", je vois la même arrière-pensée que dans les louanges des actes impersonnels et conformes à l'intérêt général : la crainte de tout ce qui est individuel. On se rend maintenant très bien compte, à l'aspect du travail — c'est-à-dire de ce dur labeur du matin au soir — que c'est là la meilleure police, qu'elle tient chacun en bride et qu'elle s'entend vigoureusement à entraver le développement de la raison, des désirs, du goût de l'indépendance. Car le travail use la force nerveuse dans des proportions extraordinaires, et la soustrait à la réflexion, à la méditation, aux rêves, aux soucis, à l'amour et à la haine, il place toujours devant les yeux un but minime et accorde des satisfactions faciles et régulières. Ainsi une société, où l'on travaille sans cesse durement, jouira d'une plus grande sécurité : et c'est la sécurité que l'on adore maintenant comme divinité suprême. »
Friedrich NIETZSCHE : Aurore

« Les pauvres croient [...] que le travail ennoblit, libère. La noblesse d'un mineur au fond de son puits, d'un mitron dans la boulangerie ou d'un terrassier dans une tranchée, les frappe d'admiration, les séduit. On leur a tant répété que l'outil est sacré qu'on a fini par les en convaincre. Le plus beau geste de l'homme est celui qui soulève un fardeau, agite un instrument, pensent-ils. "Moi, je travaille", déclarent-ils, avec une fierté douloureuse et lamentable. La qualité de bête de somme semble, à leurs yeux, rapprocher de l'idéal humain. Il ne faudrait pas aller leur dire que le travail n'ennoblit pas et ne libère point ; que l'être qui s'étiquette Travailleur restreint, par ce fait même, ses facultés et ses aspirations d'homme ; que, pour punir les voleurs et autres malfaiteurs et les forcer à rentrer en eux-mêmes, on les condamne au travail, on fait d'eux des ouvriers. Ils refuseraient de vous croire. Il y a, surtout, une conviction qui leur est chère, c'est que le travail, tel qu'il existe, est absolument nécessaire. On n'imagine pas une pareille sottise. La plus grande partie du labeur actuel est complètement inutile. Par suite de l'absence totale de solidarité dans les relations humaines, par suite de l'application générale de la doctrine imbécile qui prétend que la concurrence est féconde, les nouveaux moyens d'action que des découvertes quotidiennes placent au service de l'humanité sont dédaignés, oubliés. La concurrence est stérile, restreint l'esprit d'initiative au lieu de le développer. »
Georges DARIEN : La Belle France

« Les hommes travaillent généralement trop pour pouvoir encore rester eux-mêmes. Le travail : une malédiction que l'homme a transformée en volupté. Oeuvrer de toutes ses forces pour le seul amour du travail, tirer de la joie d'un effort qui ne mène qu'à des accomplissements sans valeur, estimer qu'on ne peut se réaliser autrement que par le labeur incessant — voilà une chose révoltante et incompréhensible. Le travail permanent et soutenu abrutit, banalise et rend impersonnel. Le centre d'intérêt de l'individu se déplace de son milieu subjectif vers une fade objectivité ; l'homme se désintéresse alors de son propre destin, de son évolution intérieure, pour s'attacher à n'importe quoi : l'œuvre véritable, qui devrait être une activité de permanente transfiguration, est devenue un moyen d'extériorisation qui lui fait quitter l'intime de son être. Il est significatif que le travail en soit venu à désigner une activité purement extérieure : aussi l'homme ne s'y réalise-t-il pas — il réalise. »
Emil CIORAN : Sur les cimes du désespoir
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